mercredi 20 mai 2009

Parler de caca énerve les enfants



Parler de caca énerve les enfants. Et pas juste un brin. Beaucoup. La grande surexcitation. Je m'en doutais bien un peu (après tout, j'en élève deux...) mais j'en ai récemment fais le constat, de façon indéniable et irréfutable.

Mais commençons par le début. Quand j'ai entamé l'écriture de mon troisième roman de la série des Babette (pour les 7-9 ans), j'avais idée de m'aventurer sur la pente glissante du scatologique. La stratégie était un peu racoleuse, je l'avoue. Je voulais faire rire les enfants avec des allusions au caca, tout en élargissant leur vocabulaire et en les hameçonnant solidement dans mon histoire. Étant prudente de nature, avant de me lancer dans un savant traité sur les excréments, j'ai fais un sondage trrrrrès scientifique auprès de quelques enseignantes.

J'ai demandé à une demi-douzaine de profs si elles croyaient que d'aborder le sujet si délicat du caca dans un roman pour premiers lecteur pouvait poser problème. Est-ce que le tabou restait encore suffisamment ancré pour empêcher certains enseignants de lire le livre avec leurs élèves?

La première réponse reçue m'a estomaquée. Une enseignante m'a en effet raconté que dans son école, certains parents étaient montés aux barricades pour protester contre l'irrésistible et désormais classique album La petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la tête. Ça m'a scié.

Heureusement, d'autres enseignantes m'ont rassurée, m'encourageant à explorer le thème périlleux de la merde, tout en précisant que le sujet allait sûrement énerver les élèves. J'en ai eu la preuve la semaine dernière, lors de mon passage à l'école St-Paul, dans le secteur Hull.

Pour rendre mon animation d'auteure plus interactive, j'avais décidé de faire une saynette avec les marionnettes qui sont les personnages du roman. Bien que les élèves avaient lu Les marionnettes de Babette, ils ont été surpris quand je leur ai proposé de reprendre la mini-pièce présentée dans le livre. J'ai distribué les répliques à de courageux volontaires. Ces apprentis-acteurs ont joué leur rôle avec un sérieux qui était tout à leur honneur. Ça donnait ceci:

Le chat angora a fait caca sur le sofa.  
 La chienne jalouse laisse sa bouse sur la pelouse.
 Le babouin taquin étend son purin sur le coussin de satin. 
 Le requin coquin lâche son crottin sur le sous-marin.
La marmotte boulotte fait ses crottes dans ses culottes.


Les enfants ont ri, ils ont ri, ils ont ri, ri, ri. Il a fallu plus de cinq minutes pour ramener le calme en classe. La maîtresse riait aussi, peut-être un peu jaune (je ne suis pas certaine et je n'ai pas osé lui demander) mais elle riait.

Comme j'avais affaire à des citadins, j'ai dû expliquer le sens des mots bouse, crottin et purin. À chaque explication, les enfants poussaient des “ouache!” ravis.

Je suis repartie soulagée de ne pas avoir été évincée manu militari de la classe, satisfaite du succès de l'expérience et heureuse d'avoir pu dilater la rate de vingt-huit jeunes. Je suis repartie en espérant qu'au-delà de la rigolade sur le crottin et le purin, les enfants se souviendraient que les livres peuvent leur offrir des surprises et du rire...

4 commentaires:

  1. Moi, je pense qu'elle riait brun, ton enseignante (-;
    J'ai moi aussi découvert l'effet polarisant du caca. Jusqu'à récemment, lors de mes présentations scolaire, j'utilisais des exemples très terre à terre pour expliquer comment l'on pouvait s'inspirer d'un livre pour en créer un autre et pour souligner la différence entre l'inspiration et le plagiat. Un jour j'eus à vendre ma salade à un groupe plus dissipé. Par hasard (ou était-ce par instinct?) j'utilisai l'exemple de quelqu'un qui lit un livre documentaire au sujet des toilettes et qui ensuite s'en inspire pour créer un personnage de toilette parlante pour son prochain roman. Et Bang! Voilà que tout le monde m'écoute à nouveau. Merveilleux, le pouvoir du caca!
    Allez, je te souhaite merde avec ton nouveau projet (-;

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  2. Mireille,
    Dis-donc, tu es douée pour l'humour scatologique!
    Andrée

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  3. Anonyme08 h 53

    Au musée de la Nature à Ottawa nous travaillons avec des groupes scolaires. Les enfants ont entre 5 et 10 ans.
    Dans la galerie des fossiles nous avons des et des coproliths que les enfants peuvent manipuler.
    C'est du caca de dinosaures fossilisé. Nous avons toute une gamme de réaction...du dédain à l'émerveillement.
    Bonne chance avec ton récit.
    Réjane

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  4. Du caca de dinosaure fossilisé! Fascinant! Va falloir que je vienne voir ça. Et il y a peut-être là matière à histoire...
    Merci pour le tuyau.
    Andrée

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