jeudi 6 août 2009

Manger amer



Deng Xiaoping en visite aux États-Unis en 1979.

Durant mon voyage en Chine, j’ai lu River Town de Peter Hessler, un témoignage évocateur, perspicace, drôle et émouvant sur ses deux années dans la province du Sichuan à enseigner l’anglais.

Ce jeune Américain vivait en Chine quand Deng Xiaoping est décédé, en 1997. Dans son bouquin, il raconte quelques anecdotes de la vie mouvementée de celui qui a dirigé les destinées de la Chine, entre 1978 à 1992.

C’est qu’il a connu plus que son lot de drames, le camarade Deng. En luttant contre la corruption du Parti communiste, il s’est fait des ennemis. Il a donc été purgé du Parti durant pendant la Révolution culturelle. Pour sa «rééducation», Deng a été envoyé en campagne pour y travailler comme ouvrier. Sa famille aussi a été « punie ». Son fils est devenu paraplégique après une mystérieuse « chute » d’une fenêtre lors d’un interrogatoire mené par des gardes de l’Armée rouge.

Mais Deng a rebondi et a lentement refait son chemin vers le Parti pour atteindre les sommets du pouvoir, qu’il a exercé jusqu’à sa mort en 1997. Reconnu pour son pragmatisme, il avait pour devise : « Peu importe que le chat soit noir ou gris : s'il attrape les souris, c'est un bon chat »

Une anecdote sur Deng Xiaoping, racontée dans le livre de Peter Hessler, m’a fascinée. Les Chinois disaient de Deng: «He could eat bitter». Littéralement : manger amer. En effet. Même s’il a fait de graves erreurs politiques (notamment la répression des manifestations sur la place Tiananmen en 1989), Deng a démontré qu’il avait du cran, du courage, de la vaillance et de la résilience pour survivre aux épreuves et privations.

Manger amer… cette expression m’a fascinée. M’a fait penser à ma vie ouatée. À mes périodes de paresse et de mollesse... Je ne sais pas «manger amer». Je ne le saurai sans doute jamais, ayant toujours vécu dans cette culture nord-américaine qui exige la facilité, le tout-tout-de-suite, la gratification immédiate.

Pourtant, si j’apprenais à «manger amer», je pourrais sans doute mieux rebondir après les déceptions ou les revers… Peut-être même que de savoir «manger amer» pourrait m’amener sur le sentier si tentant... et si épeurant... du dépassement.

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