vendredi 5 juin 2009

"La gloire est le deuil éclatant du bonheur"



Voici les livres dont je parlerai demain matin à l’émission les Divines tentations. La chronique peut-être écoutée en baladiffusion ici :

Le violoncelliste de Sarajevo, Steven Galloway, JC Lattès. 298 pages
Ce roman tragique frappe par ses contrastes prononcés. On nous y montre l’humain dans toute sa barbarie, capable de violences inimaginables. On nous y montre aussi l’humain qui malgré les obus et les snipers, malgré la destruction insensée d’une ville, malgré les pires privations, malgré la mort toujours trop près, préserve un intense désir de vivre, conserve le goût d’aider son prochain.

Uashat, Gérard Bouchard, Boréal, 328 pages.
L’historien/sociologue relate ici comment les Blancs ont dépossédé les Amérindiens, dans ce cas, ceux de la réserve Uashat, près de Sept-Îles. Les deux personnages principaux (un jeune étudiant de Lévis et un vieux Montagnais) sont des anti-héros: maladroits, maladifs, malheureux, esseulés et envieux, ils finiront tout de même par s’apprivoiser et devenir amis. Bien sûr, ça ne pourra finir qu’en drame. On ne peut lire ce roman sans éprouver les tiraillements de la culpabilité, sans sentir la morsure de la honte.

La promesse, Hubert Mingarelli, Seuil.
J’ai rarement lu un écrivain qui maîtrisait à ce point l’art de l’éllipse, qui enveloppait la pudeur dans une aussi délicate dentelle.

L'énigmatique Céline Dion, Denise Bombardier Albin Michel et XO éditions. 232 pages
Je ne suis pas une fan ni de la journaliste/auteure, ni de la chanteuse. N’empêche que Mme B. livre ici une intéressante analyse du personnage Céline, qui a choisi de « théâtraliser » sa vie. En exergue de son essai, la journaliste/sociologue présente cette citation de Mme de Staël:«La gloire est le deuil éclatant du bonheur.» Ça donne une idée de son analyse quant à la prison dorée de notre Céline nationale.

mardi 2 juin 2009

Vive l’indignation



J’aime les gens qui s’indignent, qui dénoncent, qui gueulent, qui s’égosillent pour une cause, qui clament leur empathie et leur ardent désir de changement.
J’aime les gens qui n’ont pas peur de monter aux barricades, de porter leur idéal en bandoulière et de tirer sur tout ce qui ressemble à de l’apathie. J’aime l’indignation qui met de l’huile dans l’engrenage du changement.

Voici quelques-uns de mes célèbres indignés préférés:
- Barak Obama (Il s’indigne avec tant d’élégance et d’éloquence qu’on a de suite envie de suivre dans ses traces.)
- Stephen Lewis (Il s’indigne avec tant de clarté et d’érudition qu’on en ressort plus instruit chaque fois qu’on l’écoute.)
- Richard Desjardins (Il s’indigne avec tant de poésie que son lyrisme outré nous reste en tête comme une chanson qui tourne en boucle.)
- Thierry Lenain (Il s’indigne avec tant d’éclat que les adultes devraient le lire autant que les enfants.)
- Françoise David (Elle s’indigne avec flair et finesse en demandant pour les femmes du pain et des roses.)

Voici quelques-unes de mes indignations récentes :
- L’état des bibliothèques scolaires au Québec.
- Les millions de tonnes de plastique qui polluent les océans et font mourir tortues, baleines, mouettes, alouette…
- Les parents qui laissent tourner leur moteur lorsqu’ils viennent chercher leur enfant à l’école.
- Le Canada qui diminue son aide aux pays les plus pauvres de l’Afrique.
- Les fonctionnaires qui ne répondent pas aux courriels du citoyen (payeur de taxes).

Sur ces sujets, j’ai gueulé, rouspété, dénoncé. Parfois publiquement. Parfois dans mon for intérieur. Parfois auprès de mon entourage immédiat. Et ça dérange. Et je vois des sourcils levés. Et je note des regards ennuyés. Et j’entends des soupirs irrités. Et je remarque des haussements d’épaules résignés.

Alors en corollaire de l’indignation viennent les questions :
Comment faire pour dénoncer sans avoir l’air arrogant?
Comment faire pour persister dans l’indignation même quand on sait qu’on tape sur les nerfs du monde?
Comment faire pour ne pas laisser s’éteindre la flamme de l’indignation?

dimanche 31 mai 2009

Bientôt, je dirigerai une opération au cerveau...



J’ai deux manuscrits d’albums en chantier. En fait, ils sont pas mal terminés, mais je n’arrête pas de les tripoter et triturer. Le sujet est-il assez accrocheur? L’intrigue est-elle suffisamment originale? Y a-t-il trop ou trop peu d’émotions? Est-ce trop ceci, pas assez cela? Un éditeur en voudra-t-il?

Quelques refus récents (pour des manuscrits d’albums) m’ont ébranlée. Moi qui croyais avoir compris, sinon maîtrisé, ce genre difficile, me voilà maintenant rongée par le doute. (Ciel que ça fait dramatique… mais c’est pathétiquement vrai).
J’ai écris plusieurs albums (au moins une demi-douzaine) avant d’en avoir un finalement accepté par un éditeur. Et cet album, je l’ai réécris pas moins d’une douzaine de fois, sous la direction judicieuse mais oh combien rigoureuse d’une grande dame de la littérature jeunesse.

Pour cette raison, rien ne me hérisse plus le poil que d’entendre des gens parler des albums comme de « petits » livres. À part leur format (et encore…), ils n’ont rien de PETITS!

Et quand j’entends des gens me dire : « Ah oui, moi aussi, un jour, j’écrirai des albums… », je hoche poliment la tête en retenant mon ricanement goguenard…Ouais… Essayez voir…

À ce sujet, une anecdote bien connue circule dans le milieu littéraire américain. C’est le Dr. Seuss qui rencontre un neurochirurgien dans un cocktail.
- Ah oui, vous êtes l’homme qui écrivez des livres pour enfants, dit le médecin. Un samedi, quand j’aurai un peu de temps libre, je vais en écrire un. »

Et le Dr. Seuss de répliquer : Et moi,quand j’aurai un peu de temps libre, je ferai une opération au cerveau. »