mardi 9 avril 2013

Elle n’a pas ouvert l’enveloppe




Elle a freiné sa curiosité.
Elle n’a pas ouvert l’enveloppe.
Ouvrir l’enveloppe était une jolie joie qu’elle réservait pour ses élèves.

Voici l’histoire. Car derrière un geste en apparence anodin (ne pas ouvrir l’enveloppe), il y a une histoire qui ragaillardit.

Par un beau matin, j’envoie par la poste mon nouvel album à Mme Julie. Rencontrée au hasard d’un salon du livre, cette prof hors pair est devenue, au fil du temps, une amie. 
Je lui envoie donc mon livre pour lui faire plaisir. Car Mme Julie, voyez-vous, est une dévoreuse d’albums, plaisir gourmand qu’elle partage avec ses élèves. Des albums, elle leur en lit constamment. 

Je lui envoie donc mon livre pour me faire plaisir à moi aussi.  Petit bonheur égoïste de savoir que dans une classe d’une école de la Mauricie, mon histoire sera lue et relue, absorbée et discutée par des élèves qui à 5-6 ans, sont déjà de fins connaisseurs d’albums, grâce à la passion de leur enseignante.

Quelques jours plus tard, je reçois ce courriel de Mme Julie : « Hey, j'ai reçu une belle enveloppe dans ma boîte aux lettres en arrivant! J'y devine un livre...  Je pense m'attacher les mains dans le dos pour ne pas l'ouvrir. Ce sera une responsabilité de l'ami du jour demain matin. »

Malgré sa curiosité, Mme Julie n'a pas ouvert l'enveloppe.
Elle tenait à offrir ce plaisir à ses élèves.
Vous me dites, ben quoi c’est rien,  elle a juste décidé de ne pas ouvrir l’enveloppe.
Non, ce n’est PAS rien!

D’abord, il fallait y penser.
Penser à la curiosité de ces petits de l’ère numérique, qui ne doivent pas voir souvent de ces enveloppes envoyées par la poste.  
Penser à l’excitation des enfants devant le mystère : y’a quoi dans l’enveloppe? 
Penser à la fierté heureuse du gamin de six ans qui aurait le privilège d’ouvrir l’enveloppe, devant  la classe.  

Aimer ses élèves ne fait pas partie de la description de tâches des enseignants.
Faire plaisir à ses élèves ne fait pas partie de la convention collective des enseignants.
Ne pas ouvrir l’enveloppe, c’était un petit geste de rien du tout, une délicate attention qui n’attire pas l’attention.
Ne pas ouvrir l’enveloppe, c’était une façon toute simple de faire plaisir à ses élèves.
De les aimer.  


10 commentaires:

  1. C'est en effet un geste d'une noblesse incalculable. Bravo, Mme Julie! Tiens, ça me donne envis de lui envoyer une enveloppe, moi aussi ;-)

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  2. C'est vrai que c'est mignon!!! Et je comprends tellement la joie de l'enfant, j'ai encore la même quand j'ai une enveloppe dans les mains: envoyée par une amie japonaise par exemple...

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  3. Wow quel geste "cute"! L'enfant doit être super super content. Ravis d'avoir fais la découverte de vos chroniques. J'espère que ça ne vous dérange pas que je vous ai ajouté à la liste de chorniques à lire.

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  4. Anonyme15 h 32

    VRai que c'Est délicat!! ET heureux et généreux!
    line Arsenault

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  5. Elle est géniale Madame Julie, en plus d'être sympathique et d'être une virtuose du ukulélé ! Bravo ma belle Julie, tu es un modèle à suivre ! Merci Andrée pour ce beau texte. Au plaisir de te rencontrer (un jour) dans un Salon du livre. :)

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  6. Merci Andrée! Tu sais, quand mon élève a ouvert l'enveloppe, je leur ai dit que le livre était tellement nouveau, qu'il venait de sortir de l'imprimerie. J'ai eu le malheur d'ajouter quelque chose comme: "Il est tellement neuf qu'il est presque encore chaud!" Du coup, tous se sont levés pour venir toucher au livre. :)
    Mireille: "noblesse incalculable"? Si je n'ouvre pas mon compte d'Hydro Québec et que je le laisse ouvrir à mes élèves (et leur donne), est-ce aussi considéré comme une noblesse incalculable?

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  7. Tu as tout à fait raison, Andrée, il faut une femme de coeur pour y avoir pensé. Ce sont ces riens qui dévoilent tout.

    Il faut une femme de coeur pour remarquer le geste d'une femme de coeur.

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  8. Mireille: oui, oui, envoie lui un livre à Julie. Et après, elle te racontera comment elle l'a lu à ses élèves et leurs réactions et leurs rigolades et leurs bricolages... etc.

    Suzane P: Ça ne me dérange pas du tout. Au contraire.

    Valérie: du courrier du Japon. Moi aussi j'en veux!

    Line: bien d'accord pour la générosité.

    Julie: ton compte d'Hydro Québec à tes élèves? Pourquoi pas? Une autre leçon de vie à leur donner. Même la lumière se paye...

    Venise: Merci. J'adore, comme tu dis si bien, ces riens qui dévoilent tout.

    Lucille: on va bien faire par se croiser ailleurs que sur la Toile.

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  9. Très belle responsabilité pour l'amie du jour, en effet!

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  10. Anonyme01 h 59

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