samedi 20 août 2011

Se révolter du malheur des autres lui a-t-il coûté son propre bonheur?


C’est le journaliste que j’admirais, davantage que l’écrivain, chez Gil Courtemanche.

J’avais d’ailleurs rendez-vous avec lui tous les samedis matins.
Je me suis abonnée au Devoir du samedi juste pour lire sa chronique, premier plaisir de mon weekend.

J’aimais qu’il s’intéresse avec tant de passion à l’Afrique alors que personne ne s’y intéresse.
J’aimais son empathie pour les déshérités, les exploités et les paumés de tout acabit.
J’aimais sa fougue à gueuler, à dénoncer, à monter aux barricades.
J’aimais (et oh combien j’admirais!!!) sa merveilleuse, sa fabuleuse capacité d’indignation.

Il y a quelques années, j’ai croisé Gil Courtemanche au Festival Frye.
La matinée n’était pas terminée mais il avait déjà un ballon de rouge à la main.
J’aurais voulu le remercier pour ses chroniques si instructives et si percutantes.
Mais son regard m’a stoppé.
Que peut-on dire à quelqu’un qui a un regard si profondément, si intensément malheureux?

Est-ce le prix qu’il faut payer pour être lucide, engagé et animé du désir de faire reculer l’Injustice? Est-ce que cette si belle qualité de Gil Courtemanche, celle de se révolter du malheur des autres, lui a coûté son propre bonheur?

Avec le décès de Gil Courtemanche, le Québec perd un grand, GRAND, chroniqueur.
Pour bien mesurer la profondeur, la complexité, les contradictions et le talent de l’homme, courez lire son superbe texte sur le bonheur que Le Devoir republie aujourd’hui.

Au revoir Gil Courtemanche. Vous ne serez pas oublié.

4 commentaires:

  1. N'est-ce pas Plume qui chantait que "l'ignorance, c'est le bonheur"? La révolte entraîne inévitablement de la frustration et de l'insatisfaction. L'idéal serait que les gens fassent le choix de se révolter ou non, en connaissance de cause. Malheureusement, l'ignorance et l'inconscience sont majoritaires. J'essaie de trouver un équilibre dans l'action motivée par un degré de révolte contrôlé...

    RépondreEffacer
  2. Anonyme21 h 31

    Un texte profond, ressentit, vrai. Il suffit en soit.
    Miche

    RépondreEffacer
  3. Tu viens remuer une grosse émotion en moi. Tu mets le doigt sur sa tristesse. Tu mets des mots sur ce que j'ai ressenti en le rencontrant pour une dédicace, ce que j'ai appelé sa carapace ... c'était une carapace de tristesse. Une écaille fine en fait qui s'effritait dès les premiers mots donnés. Elle ne l'empêchait pas de rentrer en contact, mais je l'ai senti si profonde, une chose à lui si inébranlable et lourde, que je suis partie en me disant, ça lui appartient. En même temps que ce ballon de rouge qu'il avait tout à côté de lui.

    Je le remercie encore pour son courage de dire.

    RépondreEffacer
  4. Martin: ça ne doit pas être facile de savoir comment contrôler sa révolte... mais j'aime bien l'idée d'essayer et de trouver divers moteurs d'action...

    Venise: Tu utilises le mot "remuer"... un mot qui va si bien à l'écriture de Gil Courtemanche. Il nous remuait, avec ses mots, sa colère et son infinie mal de vivre..

    RépondreEffacer