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J’ai toujours admiré l’idéalisme, l’engagement et la fougue de
Pierre Bourgault. Et je trouve que sa disparition a laissé un grand vide dans le paysage québécois de l’activisme et de la dénonciation noble.
En cette période de l’année où l’on donne beaucoup, mais pas toujours les bonnes choses ou pour les bonnes raisons, ce texte de Pierre Bourgault, publié en 1999, n’a rien perdu de sa pertinence.
« Je n'aime pas la charité, mais je m'y fais. Non pas parce que je désespère de voir advenir la justice, mais parce que je sais qu'elle est encore loin et qu'il serait odieux si, en son nom, on laissait les gens crever de faim.
Seule la justice peut éliminer la pauvreté. En attendant, seule la charité peut la rendre un peu moins désespérante. Voyez toutes ces guignolées, toutes ces souscriptions, tous ces paniers de Noël et tous ces carnavals de bienfaisance; c'en est devenu grotesque et pourtant.
Pourtant, il faut tricoter des bas pour garder les gens au chaud en attendant que la justice en fournisse à chacun une douzaine de paires. Il faut remplir un panier de Noël en attendant que la justice nourrisse tout le monde à sa faim. Il faut faire l'aumône à qui tend la main dans la rue en attendant que la justice paie le hamburger chez McDonald. C'est parce que nous ne sommes pas assez justes que nous avons le devoir d'être charitables. »
Pierre Bougault, La Résistance - Vlb Éditeur. p. 166