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La folle histoire de l’enfantement d’un roman
Voici ma dixième et dernière leçon, la plus importante de tout. Comme toi, je vis entourée d’écrans : ordi, télé, tablette, téléphone intelligent. Et comme un grand pourcentage de la population, je ne cesse de sautiller d’un écran à l’autre. Les chercheurs affirment d’ailleurs que la capacité de concentrer serait la compétence la plus recherchée du 21e siècle.
Tout au long des deux années d’écriture de J’avais tout prévu sauf les bélugas, j’ai éprouvé d’énormes difficultés à concentrer. Au moindre blocage, à la moindre question, je m’évadais sur Internet pour vérifier ceci ou cela. Je cliquais sans arrêt sur ma souris, comme une puce qui a bu trois bouteilles de Coke. Je passais de Twitter à Facebook aux sites de nouvelles et hop, on recommence. Chaque petit détour sur le Web me coûtait un temps précieux pour reprendre le fil de mon récit et retrouver ma concentration. L’Internet était mon plus délicieux divertissement. L’Internet était aussi ma drogue et mon pire ennemi.
Devant autant d’extrême indiscipline, j’étais frustrée, découragée et déçue de moi-même. Si je ne changeais pas vite ma façon de travailler, il me faudrait 10 ans pour terminer ce roman. Aux grands maux les grands remèdes. J’ai sorti des boules à mites un vieil ordinateur où je n’avais pas d’accès à l’Internet. J’ai installé ce dinosaure sur une petite table dans ma chambre à coucher. J’ai coiffé mes oreilles d’écouteurs antibruit. Je me suis ainsi créé une bulle de silence, loin des clics et des pings, loin du gouffre sans fin d’Instagram.
Petit à petit, ma capacité de concentrer est revenue. Grâce à ce rituel, j’arrivais enfin à travailler en profondeur. Je réussissais à faire 3 ou 4 heures d’écriture par jour, sans interruption. Après un avant-midi dans ma bulle, je retournais dans mon bureau pour répondre aux 202 courriels accumulés et m’évader sporadiquement (et joyeusement…) sur la Toile.
Leçon d’écriture 10: Ici, la leçon d’écriture devient aussi une leçon de vie. Un message que j’aimerais écrire en lettres géantes et hurler dans un mégaphone. Tu veux être un bon auteur, un bon joueur de hockey, un bon guitariste, un bon danseur de tango? Éteins ton Internet de temps en temps! Ceux qui s’épanouissent et s’accomplissent, ceux qui brisent des records, ceux qui jouent joliment du piano, ceux qui courent un marathon ou cuisinent de succulents gâteaux, sont ceux qui savent s'éloigner de leurs écrans.