10 leçons d’écriture (une par jour)
ou
La folle histoire de l’enfantement d’un roman
Juin 2018
Peut-être que dans une vie antérieure, j’ai été maîtresse d’école? J’ai en moi ce réflexe agaçant de vouloir expliquer, enseigner, donner des leçons (ce n’est pas un hasard ces 10 leçons d’écriture…)! Mais un auteur qui se prend pour un professeur signe son arrêt de mort.
Malgré une cinquantaine de livres publiés, j’ai encore un déplorable tic d’écriture : la fâcheuse tendance à tout expliquer. Pourtant, c’est la toute première règle enseignée dans un cours d’écriture : « Show, don’t tell ». Montrer plutôt qu’expliquer.
Celui qui a démontré le plus clairement cette technique est mort depuis plus de 100 ans. Dans les mots d’Anton Tchekov : « Ne me dites pas que la lune brille. Montrez-moi le reflet de sa lueur sur un verre brisé. »
Quand l’auteur montre au lieu d’expliquer, il laisse le lecteur se faire une image mentale d’une scène, d’une émotion. Le lecteur est ainsi plus actif, peut davantage entrer dans le récit et stimuler son imagination pour arriver à ses propres conclusions.
Voici un exemple tiré de J’avais tout prévu sauf les bélugas. Au début, je suis dans l’explication, avec cette phrase : « Thomas est frustré d’être malheureux. » Après révision, je m’efforce plutôt de montrer, avec cette phrase qui veut dire la même chose : « Est-ce qu’un jour il va finir par faire beau dans ma tête? »
Outre ma tendance à faire trop didactique, j’ai une autre mauvaise habitude : celle de faire la morale. Les jeunes – justement parce qu’ils sont jeunes – entendent sans cesse des adultes leur dire : Ça c’est bien, ça c’est mal, ne fais pas ceci ou cela, etc. Si en plus, les jeunes doivent se taper des sermons d’auteur dans un roman, ils vont vite refermer le bouquin et s’enfuir vers YouTube.
Dans la suite de La plus grosse poutine du monde, Samuel décide de sauter du toit de l’école. Au premier jet, j’ai mis un long discours de la directrice d’école sur le danger d’un tel acte. À la relecture, j’ai coupé, pour laisser les lecteurs tirer leurs propres conclusions.
Leçon d’écriture 6: Un roman, ce n’est pas un manuel de l’apprenti conducteur. Pas besoin de tout expliquer. Fais confiance à ton lecteur. Évite de moraliser. Laisse-lui le plaisir de lire entre les lignes.
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