Petite histoire où j’apprends quelques
grandes leçons de vie
Autant le sable est doux, autant le sable
est traître. Hypocrite le sable, qui
avale vite et en silence ce qu’on a le malheur d’y laisser tomber.
Mais commençons par le début. Le début de
cette aventure, qui a pourtant bien démarré, c’est une balade à vélo sur la piste cyclable
qui longe l’océan Atlantique, entre Biscarosse et Arcachon. Des kilomètres et des kilomètres d’une bucolique
piste dans la forêt des Landes. Moi et ma gang (mon chum et mes deux ados), on
roule en ahanant, sueur au front, gracieuseté de ce soleil d’après-midi qui, dans
l’Aquitaine, aime bien nous taper sur la tête.
Première
leçon de vie : apprécier plutôt que râler
La selle trop dure, le vélo trop
petit, la chaleur agressive, la sueur
qui pique les yeux… arrête de râler ma vieille. Depuis mon arrivée dans cette
douce France, trois Français, dans trois villes différentes, m’ont déclaré :
« Les Français sont des grands râleurs… »
Donc, je pédale en me répétant : ferme
ta gueule et apprécie ma vieille. Apprécie
ces paysages immortalisés par Mauriac.
Apprécie ces pins des Landes, si majestueux, si élégants. Apprécie le chant
strident des cigales. Apprécie tes
vacances en France. Apprécie de pouvoir pédaler en toute liberté. Apprécie le
moment. Là. Maintenant.
Apprécier plutôt que râler.
Quinze kilomètres et une heure plus
tard, pause-Orangina à la plage Lagune de
Biscarosse. Nous verrouillons les quatre
vélos avec notre seul et unique cadenas.
Et hop, on va se trainer les pieds dans le sable blanc de la plage.
Deuxième
leçon de vie : le sable est traître
Autant le sable est doux, autant le sable
est traître. Essayez de retrouver une
clé de cadenas sur une plage de sable.
Essayez voir. On cherche, on
cherche, sans trouver bien sûr. Le sable
a avalé la clé. Pour toujours et jusqu'à l'éternité.
Nos quatre vélos cadenassés, faudra-t-il marcher les 15 kilomètres jusqu’à
Biscarosse?
Troisième
leçon de vie : ne partez jamais sans votre pince-monseigneur
Je demande de l’aide au quinquagénaire basané
qui vend des Esquimaux dans un kiosque en bois sur la plage. Notre clé volatilisée le fait rigoler : « Vous
êtes les troisièmes à qui cela arrive cette semaine! » s’exclame-t-il. Heureusement, il a une pince-monseigneur. Une pince énorme, ancienne… mais efficace.
Pendant tout ce temps perdu à chercher une
clé perdue… je n’ai pas râlé. Pas de
reproche, pas d’impatience, pas de « t’aurais dû ceci » ou « pourquoi
t’as pas fait cela? »
J’ai décidé que ni le traitre sable, ni le
soleil agressif, ni mes muscles endoloris, ni la clé perdue n’allaient faire de
moi une râleuse.
Je me suis forcée à en rire.
Du coup, nos déboires m’ont semblé plus
légers, plus faciles à supporter.
Avant même de réenfourcher nos vélos, je
savais que cette mésaventure rigolote allait venir enrichir le patrimoine de nos
souvenirs de famille. Le genre d’histoire
qui dans 10 ans, nous fera dire : Te souviens-tu de la pince-monseigneur
sur la plage de Biscarosse?