C’est une habitude (pas toujours bonne), une sorte de sport (pas très
sain) ou même parfois un automatisme… pour les auteurs de se plaindre de leurs
éditeurs. Ces dernier temps, les décibels des geignements et jérémiades
ont monté en flèche, à cause de cette période houleuse-et-douloureuse que traverse le milieu du livre.
Les plaintes des auteurs à l’égard des
éditeurs sont aussi nombreuses que diverses :
- Ils prennent trop de temps à répondre à nos courriels.
- Ils ne répondent pas à nos courriels.
- Ils ne donnent pas d’à-valoir.
- Leurs à-valoir sont pathétiques.
- Ils négocient durement les droits numériques.
- Ils sont pingres sur le marketing de notre « œuvre »
- Ils sont chiches sur les frais d’hébergement dans les salons du livre.
- Ils ne comprennent pas vraiment notre « œuvre ».
Et j’en passe.
Donc, pour moult auteurs, même
pour ceux qui apprécient-aiment-ou-adorent leur éditeur, subsiste toujours ce
désir secret de voir l'éditeur en question se montrer plus généreux.
Eh ben récemment, j’ai eu le plaisir de voir à l’œuvre un éditeur
renommé pour sa générosité. Je l’ai pris
– cet éditeur - en flagrant délit de
magnanimité. Comme je ne publie pas dans
sa maison, je peux raconter librement l’épisode sans qu’on me traite de
lèche-bottes.
Lors d’un récent souper impromptu à Montréal, avec quelques auteurs jeunesse, cet éditeur a
été invité. C’est pour vous dire à quel point il est apprécié (z’en connaissez
beaucoup vous, des éditeurs qui vont manger avec des auteurs??? Et je ne parle pas
d'un repas-pour-discuter-boulot, mais bien d'un repas partagé simplement pour le plaisir...)
Bref, durant ce souper, une des auteures taquine l’éditeur en lui rappelant qu’il a refusé un de
ses manuscrits, mais qu'il a adouci sa lettre de refus avec l’envoi d’un
livre. Et moi de m’exclamer, incrédule : « Hein? C’est pas vrai! Un éditeur
qui envoie un livre avec une lettre de refus! Du jamais vu!!! »
Et l’éditeur en question, Robert Soulières, pour ne pas le nommer,
répond : « Ben oui, j’envoie
souvent des livres avec des lettres de refus.
Surtout aux auteurs qui débutent, pour les encourager. »
Combien d’éditeurs prennent le temps de rédiger des lettres de refus? Et d’envoyer un livre en sus, en guise de consolation! Je parie que c'est dans le très rare.
En 1998, Robert Soulières a gagné le prix Christie en 1998 pour son
roman Un cadavre de classe.
De la classe, Soulières en à revendre.
De la classe, Soulières en à revendre.
Est-ce parce qu’il est auteur lui-même que cet éditeur démontre une si
belle empathie à l'égard des écrivains? Si tous les éditeurs étaient aussi des écrivains, l'édition s'en porterait-elle mieux?
Comme éditeur, Soulières est un chercheur d’étoiles (littéraires).
Par sa bonté (coucou Colombe…), il allume aussi des étoiles dans les
yeux des écrivains-en-devenir.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là.
À ce même souper se trouvait une jeune femme (qui par hasard était ma sœur…) qui travaille pour l’organisme Hippy-Québec.
À ce même souper se trouvait une jeune femme (qui par hasard était ma sœur…) qui travaille pour l’organisme Hippy-Québec.
Ma sœur donc raconte les activités de Hippy auprès des
enfants d’âge préscolaire à Robert Soulières, qui écoute poliment. En coordonnatrice zélée, elle lui refile même sa
carte d’affaires à la fin de la soirée.
Quelques jours plus tard, ma soeur reçoit, au bureau de Hippy-Québec, une
enveloppe de livres de Soulières éditeur, destinés aux enfants inscrits dans le programme.
Robert Soulières a une qualité qu’on voudrait voir plus souvent, et pas
seulement chez les éditeurs. Cette qualité s'appelle le sens des autres.
Oui, vraiment, voilà un éditeur qui n’a pas le cœur en chômage.
Oui, vraiment, voilà un éditeur qui n’a pas le cœur en chômage.
NDLR: Aux OSBL qui pourraient lire ce billet de blogue, surtout n'envoyez pas votre carte d'affaires aux éditions Soulières. L'homme a beau être généreux, il ne vit pas de l'air du temps...