dimanche 30 octobre 2011

Combien de gens accepteraient de travailler pendant une semaine sans salaire?


Pour voir ce tableau complet sur le travail gratuit, c’est ici.

- Quand vous achetez votre rôti de porc chez le boucher, lui demandez-vous de rajouter une petite cuisse de poulet d’extra?
- Quand le plombier vient de réparer votre tuyau qui coule, lui demandez-vous de déboucher gratuitement la toilette comme « petit extra »?
- Quand le facteur vous apporte votre courrier, lui demandez-vous de poster pour vous un colis, comme « petit extra »?

Chaque automne, les écoles m’appellent. Pour des animations scolaires.
Dans le cadre du programme Culture à l’école, les auteurs sont rémunérés pour trois animations d’une heure par jour. Rémunération qui, je le signale en passant, n’a pas été bonifiée depuis plus de dix ans et est largement en-dessous de ce qu’offre le Conseil des arts du Canada pour ce même type d’animation. Mais ça c’est une autre histoire…

La semaine dernière, une enseignante m’appelle pour m’inviter à faire des animations d’auteure à son école. Nous discutons ensemble de l’horaire et du nombre de groupes qu’elle veut que je rencontre. Le Programme précise que le nombre maximal d’élèves par groupe est de 35. Pour accommoder l’école, j’accepte de prendre deux classes par animation, donc des groupes de 55 élèves. Avant de conclure, l’enseignante me demande si je peux faire un petit extra en rajoutant une « petite » présentation pour les maternelles.

Si je rajoutais une «petite présentation d’extra » pour chaque journée d’animation que j’offre dans les écoles, ça me ferait sans doute une semaine de travail gratuit par année. Vous en connaissez beaucoup des gens qui travailleraient une semaine sans salaire?

Les écrivains ne vivent pas de leurs droits d’auteur. Les écrivains font des sacrifices financiers pour écrire. Je ne demande pas une médaille pour ça. Personne ne m’a demandé d’écrire, c’est mon choix et je l’assume. Mais qu’on me demande un « petit extra » me froisse, me hérisse et me désole. On a encore beaucoup de chemin à faire pour la reconnaissance du statut de l’artiste…

Demanderiez-vous au plombier qui vient de réparer votre tuyau qui coule de déboucher gratuitement la toilette comme « petit extra »?

15 commentaires:

  1. Je suis du même avis que toi, chère Andrée!
    Au lieu de faire 3 présenations de 60 minutes par jour dans le cadre de la tournée Lire à tout vent les écoles ont décidé (sans me consulter) qu'il serait plus pratique de me faire faire 6 présentations de 30 minutes. "C'est pareil pis ça nous dépanerais tellement" ARG! Je ne suis pas un DVD sur lequel en a juste à faire "replay". 6 présentations c'est épuisant! J'ai déjà hâte que la tournée soit fini pis elle n'est même pas encore commencé. Ouf!

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  2. Bon texte et tout à fait d'accord avec toi. Mais la vie est ainsi faite... y a des gens qui ne pensent pas plus loin que le bout de leur nez!

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  3. Katia Canciani11 h 37

    Très récemment, lors d'un salon du livre, je me présente dans une école pour faire mes trois rencontres. Sur l'horaire que l'on m'a donné, je dois rencontrer 3 classes de 1e année successivement.

    Or, voici ce à quoi j'ai eu droit : pour la 1e présentation, les 3 classes de 2e années sont arrivées (65 élèves); puis j'ai eu droit à 2 classes de 1e successivement (50 élèves chaque fois).

    Ajoutons à cela, pour me faire bouillir un peu plus : les enfants assis par terre, dans la cafétéria, alors que les cuisiniers préparaient les repas du midi... "Mais madame, avec le casque-micro, tout le monde va vous comprendre"

    Me l'avait-on dit avant ? Non. C'était inacceptable. Mais il m'était quasi impossible, dans la situation, de renvoyer tous ces enfants de 2e années qui arrivaient sourire aux lèvres pour la première présentation... Je dois avouer que j'en ai ragé. Sans compter que je n'avais pas prévu apporter autant de signets !

    Bref,je sympathise avec vous, Andrée et Mireille !

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  4. You should have said that you were already doing “un petit extra” by allowing 2 sessions to consist of 55 students instead of the government mandated 35. Maybe you could return another day to do the “maternelles” and some more groups.

    Don’t worry, the teacher is asked “un petit extra” also, supervise the school dance on Friday night, only 2 hours, from 7pm to 9pm, ruining his entire Friday night.

    And yes, other professionals get asked for “un petit extra”. Tradesman are always asked to take a quick look at the outside plug that doesn’t work, the fluorescent that continuously blinks, the toilet that always seems to never stop flushing completely or listen to the strange sound coming from the car engine. I myself once asked the lawyer closing our house sale to notarize 4 documents and he did it for free.

    Un petit extra is just the cost of doing business. You try to factor it into your costs (you it is for return business) and just accept it as best you can. If not you will drive yourself nuts.

    As long as there nice people trying to do the best for our children and nicer people willing to help them out, there will always be requests for “un petit extra”.

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  5. Ma mère qui relisait un livre que j'ai écrit en 1979: "Pourquoi nous avons cessé d'enseigner", me demandait "Penses-tu que c'est encore pareil? Penses-tu que ç'a changé dans les écoles?" Après avoir lu ce billet, je vois bien que rien n'a changé. Hélas!

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  6. Je renchéris, les filles. Le nombre de fois où j'aurais tout balancé si ce n'avait été de priver les enfants de la rencontre avec l'écrivain...

    Cette année, j'ai même eu droit à une école qui voulait profiter de mon passage à Ottawa pour que j'aille leur faire une petite visite. Gratuitement, ça va de soi (ben quoi ? Vous serez sur place !).

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  7. Anonyme17 h 56

    Dans le cadre du programme Les Écrivains à l'école, je refuse de rencontrer plus de 35 élèves par animation grâce à cette formule toute faite : «C'est une règle établie par le Ministère». Cela passe très bien auprès des enseignants.
    Il est arrivé par contre, lors d'animations dans un autre cadre, que les termes de départ n'aient pas été respectés. J'ai interrogé quelques auteurs d'expérience et voici ce que je ferai la prochaine fois : si on me met le double d'élèves, j'accepterai de faire l'animation, mais en diminuant le temps de prestation si j'estime qu'il est trop difficile d'avoir l'attention de tout ce beau monde.

    Agnès Grimaud

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  8. Anonyme18 h 07

    Des œillères - les enseignants les portent aussi. Comme Roy l’a si bien expliqué, tous tentent d’en avoir plus pour moins et tous ont la même difficulté – se placer dans les souliers des autres. Dans le cas des enseignants, je crois qu’au cœur des demandes sans considération pour les auteurs, se trouve le désir d’offrir des expériences enrichissantes aux élèves. Bien que ça soit frustrant pour les auteurs, dites-vous que c’est un hommage au pouvoir de vos mots. Je suggère donc, si possible, que les auteurs clarifient les termes de leurs contrats avec les écoles et que vous puissiez avoir le nom d’une personne contact afin de discuter directement à elle. Sachez aussi qu’il est peut-être préférable de continuer à faire preuve d’une certaine flexibilité puisqu’il est possible que des écoles ne puissent pas vous recevoir parfois si par exemple, elles ont 4 classes de 2e année et que vous ne faites que 3 présentations. Une bonne communication entre les auteurs et les écoles fera en sorte que tous en sortiront heureux.
    Marie

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  9. Anonyme19 h 47

    Quand une école veut me faire venir pour 4 groupes, je lui suggère de me déplacer une journée et de faire trois animations. Les élèves du 4e groupe sont éparpillés dans les autres groupes. Ainsi, la limite de 35 est respectée. L'école est contente et moi aussi, car je suis alors placée dans de bonnes conditions d'animation.

    La flexibilité est nécessaire... du moment qu'elle ne se transforme pas en bénévolat.
    Agnès G.

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  10. Daniel Sernine14 h 31

    Tu aurais dû demander un «petit extra» à l'enseignante: venir donner un cours de rattrapage à l'une de tes filles, chez toi. «Un p'tit deux heures»; d'abord, vous travaillez pas, le samedi?»

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  11. Ohlala, je suis étonnée. Pensais pas que ce billet susciterait autant de réactions...

    Aux auteurs, Mireille, Camille et Katia: je compatis.

    A l'auteure/enseignante, Agnès: je reconnais bien ton esprit pratique et ton sens du compromis qui ne déçoit pas...

    Aux enseignants Roy et Marie: Au risque d'avoir l'air de me contredire, (mais non ce n'est pas une contradiction) je suis entièrement d'accord avec vous... Il faut être flexible et accepter aussi de donner de soi, bénévolement. Je le fais et la plupart du temps, je suis heureuse de le faire... Mais parfois, ça fait du bien d'exprimer aussi les frustrations...

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  12. Beaucoup d'effervescence ici !

    Il y a un vieux fond de concept qui se cache au fond de tout ça, les artistes devraient donner, devraient se tenir loin des questions mercantiles pour garder la pureté de leur art.

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  13. Ce que vos mentionnez me rappelle aussi le nombre de fois où, lorsque j'étais libraire, il fallait expliquer pourquoi les écoles n'avaient pas droit à de rabais (loi permettant aux librairies de survivre et de proposer une bibliodiversité), ou plus largement, pourquoi un livre était payant... que les auteurs ne vivaient pas d'amour et d'eau fraîche, que oui parfois tel livre est cher mais vu la qualité du papier, tout le travail derrière, etc... C'était épuisant parfois, mais important!

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  14. Alice,
    Ah oui, le travail des libraires pour expliquer les coûts du livre.... toujours à recommencer...
    Dis-donc, je viens d'aller jeter un coup d'oeil sur votre blogue... Il est magnifique! Je vais le rajouter à ma blogoliste!

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