mardi 1 avril 2014

Peut-être qu’ils n’aimaient pas ma tronche?




On s’est approchées pour prendre des photos du fleuve Sénégal.
Ils nous ont dit : 1 000 francs. Il faut payer.
Ils étaient cinq, bombant le torse dans leurs t-shirts de soccer.
Cinq pré-ados, plus tout à fait des enfants, pas encore des hommes.

Ils ont continué à nous demander de l’argent.
On a continué de dire non.
Ils ont répété nos paroles, d’un ton nasillard, se moquant de notre accent québécois.

Quand j’ai tourné le dos pour retourner à notre voiture, l’un d’eux m’a lancé une balle de tennis.
La balle m’a frappée dans le dos.
Comme la balle était molle et le lancer tout aussi mou, je n’ai eu aucun mal.
À part l’égratignure à ma dignité.

Une fois dissipé le mouvement initial d’indignation, m’est resté surtout l’étonnement.
Un étonnement peiné.
Et cette même question lancinante : pourquoi?
Pourquoi?
Pourquoi?

  • Parce que je suis Blanche?
  • Parce que je suis une étrangère?
  • Parce qu’ils pensaient que je suis riche?
  • Parce que j’ai refusé de donner de l’argent?
  • Parce qu’ils voulaient mettre un peu d’excitation dans leur dimanche trop calme?
  • Parce qu’ils en ont ras-le-bol de voir des touristes débarquer sur leur île?
  • Parce que je ne suis pas musulmane?
  • Parce qu’ils rejettent la teranga, cette fameuse hospitalité dont les Sénégalais se font une fierté?
  • Parce qu’ils n’aimaient pas ma tronche? 

Pourquoi?
Sais pas.
Saurai jamais.
Voyager, c’est aussi accepter que certaines questions restent sans réponse.

6 commentaires:

  1. They are certainly not throwing salt behind themselves everyday.

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  2. Et peut-être que ces réponses sont toutes justes...

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  3. Peut-être parce qu'une journée sans insulter personne est une journée manquée. Prends le pas personnel...

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  4. Anonyme21 h 23

    Tiens, ca me rapelle ton billet du 7 juin 2011, que je copie en partie ci-dessous. Interessant! Il y aurait sans doute plusieurs paralleles a faire....

    "Toujours en route vers mon hôtel, je fais une pause devant les bureaux de La Presse, rue St-Antoine, pour examiner les photos géantes des chroniqueurs vedettes. À ma grande surprise, même Foglia, que j’étais habituée à ne voir que de dos pendant des années, a accepté de s’afficher sur ces immenses panneaux réclame.

    Un homme s’approche, jambes flageolantes et m’apostrophe d’une voix pâteuse: « Good evening Madam, could I ask you… »
    Je lui fais un petit signe de la main pour signifier que je ne donnerai rien. Il se met à crier. Non, il ne crie pas, il hurle. Non, il ne hurle pas, il beugle, à tue-tête :
    «You f***ucking c***nt!»

    Plus que la vulgarité de l’insulte, c’est son cri, rageur, violent, haineux, qui me bouleverse. Je détale en courant, la peur au ventre.

    La hargne humaine me glace."

    Daniele

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  5. Danièle: wow, tu as une bonne mémoire! Moi aussi j'ai pensé à cet incident quand le garçon sénégalais m'a lancé la balle. Tous les deux voulaient de l'argent...

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