vendredi 3 octobre 2014

À la rencontre d'une illustratrice passionnée





Anne-Claire Delisle a illustré Un bain trop plein, notre nouvel album maintenant en librairie. Rencontre avec une créatrice méticuleuse, rigoureuse et passionnée.







Trois jours de travail sur une page 

Andrée : Raconte-moi ton processus de création
Anne-Claire : Je fais des tonnes de croquis, à la main, au crayon à la mine de couleur. La conception, la création sont les parties que je préfère. Le tracé de l’image est fait à la main et je fais ensuite la coloration à l’ordinateur. Chaque illustration, chaque page, me prend trois jours de travail.

J’ajoute beaucoup de détails, pour que l’enfant puisse vraiment entrer dans l’univers de l’histoire. J’aime que les images rajoutent un peu d’histoire. Par exemple, j’ai ajouté un crabe sur la page, ce qui n’est pas mentionné dans le texte.



Mon défi, c’est d’amener les enfants à se poser des questions. Les jeunes aiment se faire raconter une histoire mais je veux aussi qu’ils aient envie de regarder l’album eux-mêmes, sans adulte. J’ai vu ça quand mes filles étaient petites. Lorsque je leur lisais des albums avec des images plus complexes, elles re-racontaient l’histoire après, à leur façon.

Étudier les pieuvres à la poissonnerie

Andrée : Fais-tu de la recherche avant de commencer à créer?
Anne-Claire : Je fais beaucoup de recherches sur le web. Avec Google images, on a tellement de documentation au bout des doigts. Je suis allée dans une poissonnerie où il y avait des pieuvres dans le comptoir alors je les ai observées, surtout pour la couleur.

J’ai travaillé sur cet album pendant que j’étais en vacances à Chandler, en Gaspésie. J’ai photographié des textures de rocher, textures que j’ai reprises pour illustrer les pieuvres et donner une profondeur à leurs couleurs. J’ai aussi photographié l’effet des vagues au bord de la plage, cette sorte de broue créée par le ressac. Je me suis servie de cette photo pour créer l’illustration où Léanne nage avec les bernard-l’ermite.

Cinq dizaines (et plus...) de créatures dans un bain!

Andrée : Quels ont été tes défis pour illustrer Un bain trop plein?
Anne-Claire : Le texte était un beau défi, car le personnage a plein d’animaux dans son bain et je voulais montrer cela, sans que ce soit dégueulasse. Le plus difficile était donc de montrer en environnement « propre ». Pour les anguilles par exemple, (un animal pas très joli…) il fallait que je leur donne un air inoffensif et rigolo.

Le nombre d’animaux dans le bain m’a aussi donné du fil à retordre, surtout vers la fin où il faut mettre plus de cinq dizaines d'animaux dans la même page! Je voulais être certaine qu’ils soient tous présents dans la pagaille. Il ne fallait surtout pas qu’il manque un oursin ou que j’aie une anémone de trop! Je les recomptais sans cesse.

Toute nue et même pas de feuille de vigne!

Andrée : Pendant toute cette histoire, le personnage principal est nu. Est-ce que cela posait un défi au niveau de l’illustration? T’es-tu censurée?
Anne-Claire : Je voulais que le lecteur oublie que Léanne est nue. Au niveau des positions, ça m’a amenée à faire des pirouettes pour cacher la nudité. Pour une des images, je me suis servie de la frontière du pli pour séparer le papa et la fillette, afin qu’il n’y ait rien de suggestif dans l’illustration.

En amour avec l’humour! 

Andrée : Je suis tombée en amour avec l’humour dans tes illustrations, où toutes les créatures marines ont des mimiques très expressives. Est-ce que tu travailles fort pour atteindre ce niveau de comique visuel ou est-ce que cela vient naturellement, sans trop d’efforts?
Anne-Claire : Je me suis beaucoup amusée en illustrant ce texte. Chaque bibitte a sa personnalité. La tortue a l’air un peu désabusée au début mais s'amuse de plus en plus à mesure que le récit progresse. Les hippocampes ont l’air un peu punk sur les bords. Quant aux pieuvres, je voulais qu’elles soient délinquantes. D’où l’idée de mettre une pieuvre qui sort du bain et qui se met à lire sur la toilette. Et d’en montrer une qui envoie de l’eau dans l’œil de l’autre.



Andrée : Quelle est ton illustration préférée dans Un bain trop plein?
Anne-Claire : J’ai deux illustrations préférées, pour des raisons différentes. La première est l’image où les poissons-clowns arrivent et Léanne s’étend sous l’eau en retenant sa respiration. C’est l’image que j’ai le plus travaillée pour avoir un effet de transparence et pour m’assurer que le lecteur comprenne que l’enfant est sous l’eau. Il y avait aussi le défi de montrer le mouvement des cheveux frisés de Léanne dans l’eau. C’est la plus belle illustration que j’ai faite.

Ma deuxième illustration préférée : celle où le papa ramène 10 pieuvres à sa fille. Cette image a été très longue à faire, car chaque pieuvre a sa couleur, sans compter les innombrables tentacules. J’étais contente de mon idée de cette pieuvre qui tient le papa par le cou, comme pour lui dire : « Je t’ai en affection. »


Bio et biblio
Anne-Claire Delisle enseigne le graphisme au cégep. Elle est collaboratrice régulière aux magasins « Pomme d’api » et à la revue Popi. Elle a publié :

Vrai de vrai Papi. Texte de Émilie Rivard. Bayard Canada. 32 pages.

L’abécédaire de Pomme et Pépin. Texte de Paule Brière. Bayard Canada. 60 pages. 

mardi 30 septembre 2014

Une fillette et des dizaines de petites bêtes dans une même baignoire



Y’a des anguilles, des anémones, des oursins, des pieuvres, des bernard-l’ermite et j’en passe. Tout ce beau monde frétille et gigote dans une seule et même baignoire. Avec au beau milieu une petite fille qui essaie de se laver. Z’avez déjà vu ça vous? Non? Alors, accourez, accourez, j’ai en plein ce qu’il vous faut : Un bain trop plein!

Il était une fois… parce que tout, mais vraiment tout, en ce bas monde, commence par... Il était une fois…  Donc, il était une fois un papa trop gentil, qui avait une petite fille qui n’aimait pas se laver. La belle Léanne trouvait en effet très ennuyeuse la corvée du bain quotidien. Pour distraire sa fille, le papa-trop-gentil se tourne vers la mer.

Que se passe-t-il quand on invite dans son bain deux anguilles frétillantes, trois poissons-clowns, quatre hippocampes qui dansent, cinq crevettes effrayées, et ainsi de suite?

Je ne vous raconte pas ce qui se passe, mais je peux vous dire que ça brasse.
Ben quoi? Je ne vais quand même pas vous révéler ce qui se passe dans le « ainsi de suite »…
Je veux que vous achetiez le livre.
Je vous dirai seulement que le point culminant est l’arrivée de dix pieuvres espiègles.
Bonjour la pagaille.
Bienvenue au champ de bataille.

D’accord, d’accord, puisque vous insistez… une petite anecdote, mais juste une.
Dans Un bain trop plein, la plus polissonne des pieuvres a le culot de s’installer sur la toilette.
Trônant confortablement sur la cuvette, la dite pieuvre s’adonnera à une activité hautement intellectuelle…
Ben quoi? Ricanez pas! Je suis certaine que ça vous arrive de faire la même chose….


En ai-je assez révélé pour piquer votre curiosité?
Êtes-vous déjà en route vers la librairie la plus proche?
Non? Pas encore?
D’accord, j’y vais donc avec un argument marketing un peu facile, mais invariablement accrocheur…
Nudité.
Y'a de la nudité dans cet album.
Hon!!!!
Oui, oui, de la chair nue, exposée à la vue des 7 à 77 ans.
Ben quoi?
Ça va de soi qu’elle est nue mon héroïne.
Vous prenez votre bain en maillot de bain vous?
Mais grâce au fabuleux talent de l’illustratrice Anne-Claire Delisle, grâce à ses ruses coquines de créatrice, il n’y a pas l’ombre de la plus petite indécence, pas une miette de scabreux dans cette histoire folichonne, pétillante, drolatique et tendre à la fois.

Un bain trop plein : mon nouvel album, publié chez Dominique et compagnie, en librairie dès aujourd’hui.

vendredi 26 septembre 2014

Quand l’outarde fait l’autruche




Quelques impressions de mon passage cette semaine à Winnipeg, à l’occasion du Festival Livres en fête.


Quand l’outarde fait l’autruche
En ballade le long de la rivière Rouge, j’ai ri de voir les outardes faire l’autruche, en s'enfouissant le bec dans les plumes.  Je suis convaincue qu’elles font exprès, ces bernaches, de laisser leur caca d’oie au beau milieu du sentier, pour se venger des  touristes emmerdants qui les prennent en photo.


Bravo Monsieur le directeur
Avant de m’envoler vers le Manitoba, j’ai écrit à l’école Pointe-des-Chênes, à Ste-Anne, pour m’assurer que les classes avaient bien un projecteur multimédia.  Le directeur lui-même me répond et m’écrit : « On a hâte de vous recevoir chez nous. »



Lors de mon passage à son école, ce directeur a assisté à ma présentation au complet (une heure!).  En dix ans d’animations, j’ai rarement vu des directeurs d’école prendre le temps de s’asseoir et d’écouter l’auteure…  J’en ai déjà parlé ici.  Merci (et bravo!) Raymond Laflèche, de votre intérêt et votre engagement pour la promotion de la lecture. 

Bourrons les rayons
Les élèves et l’équipe d’enseignants de l’école Pointe-des-Chênes font une levée de fonds pour renflouer leur bibliothèque.  Leur objectif : 25 000$.   J’adore le nom de leur opération levée de fonds : Mission Bourrons nos Rayons




Précieuse spontanéité
Après mon animation à l’école LaVérendrye, je suis restée à placoter un peu avec l’enseignante.  Au moment où je partais,  la dame m’a dit merci et m’a serrée dans ses bras.  Les petits viennent souvent me faire des câlins après une animation alors ça ne m’étonne plus. Mais sur le coup, le geste de cette enseignante m’a surprise... et ravie. La spontanéité chez les adultes : si rare et pourtant si belle.


Walmart maintenant éditeur?
Bien des élèves s’imaginent que l’auteur publie lui-même ses livres et ne connaissent donc pas le métier d’éditeur.  J'ai donc posé la question suivante dans une classe de septième année : où est-ce que l’auteure envoie son manuscrit quand il est prêt à être publié?  Une fille lève la main et répond, le plus sérieusement du monde : Chez Walmart.


Rigoler avec sa concurrente
On ne s’était jamais rencontrée et on est en compétition pour le même prix.  Un GROS prix.  Mais ses livres m’intéressaient et je soupçonnais que derrière l’auteure se cachait une femme fascinante.  On n'habite pas la même ville et voilà qu'elle se trouvait à Winnipeg en même temps que moi. J’ai tergiversé : je l’appelle ou je l’appelle pas? Finalement, j’ai osé l’appeler.  Et elle a dit oui.  Devant un plat de pâtes aux crevettes arrosées de Merlot, on a parlé voyages, écriture, prix littéraires, tenue de gala (elle a déjà la sienne…)  Une conversation en feu roulant. Et on a rigolé comme deux écolières. Quel vif plaisir, quel cadeau inattendu que ces complicités nouées avec une auteure agitée par les mêmes doutes et les mêmes élans…  Hé, Élizabeth Turgeon, on va récidiver hein? 

Poutine record
En faisant une animation dans une école sur La plus grosse poutine du monde, on m’apprend que c’est le Manitoba (désolée le Saguenay…) qui détient désormais le record Guinness de la plus grosse poutine du monde. Ça s’est passé à Brandon, le1er juillet 2014.  Une poutine de 1 949 livres!


lundi 22 septembre 2014

Mettre un manuscrit à la poubelle... douloureux apprentissage



Ça donne quoi de fouetter un cheval mort?
Rien du tout.
Rien de rien.
Rien pantoute.
Ça donne quoi de s’acharner sur un mauvais manuscrit?
Rien du tout.
Rien de rien.
Rien pantoute.

Mais c’est dur (DUR!) d’admettre que son manuscrit ne sera jamais bon.
D’admettre que le cheval est mort.

Il a bien ces mots d’encouragements d’une amie auteure, qui a franchement (et courageusement) critiqué mon texte médiocre : « Un manuscrit qui n'aboutit pas en livre publié, ça compte dans notre 10 000 heures. C'est un tremplin vers une autre histoire. » 


N’empêche.
Ça écorche de mettre un manuscrit à la poubelle.
À cause du temps investi.
À cause de la sueur suée.
À cause de l'espoir gonflé.
À cause des images imaginées.


Mettre un manuscrit à la poubelle.
Un mal parfois nécessaire.
Un douloureux apprentissage.

jeudi 11 septembre 2014

Petite piqure de rappel dans un monde en quête de sens




En faisant de la recherche pour mon album Pablo trouve un trésor, suis tombée sur le travail absolument fabuleux, absolument fascinant du photographe français Paul-Antoine Pichard.

Engagé jusqu’au bout des ongles, ce créateur considère la photographie comme « la médecine de la conscience ». Il dit d’ailleurs de son art qu’il est une « petite piqure de rappel dans un monde en quête de sens ». Cette phrase m’a longuement tourné en tête, à tel point que j’ai décidé d’en faire mon credo d’auteure.

                   
Pendant plus de deux ans, Paul-Antoine Pichard s’est baladé en Asie, en Afrique et en Amérique latine, hantant les décharges publiques, prenant en photos ces hommes, ces femmes et ces enfants qui vivent de ce douloureux recyclage. Le photographe/reporter en a rapporté des images bouleversantes, rassemblées dans un livre intitulé Mines d’ordures.


Anecdote tirée de son bouquin :
« Un petit chiot de quelques jours pleurait dans les ordures, échappé d’un sac percé. J’ai appelé un gamin pour lui montrer. Il l’a pris et balancé de toutes ses forces contre un talus. J’ai été surpris de la violence de son geste, avant de réaliser qu’il venait simplement d’éliminer son premier concurrent. Un chien errant. »

jeudi 4 septembre 2014

Voile levé, larme versée



Ce que les critiques ont dit de Pablo trouve un trésor :

Voile levé, larme versée
« Magnifiquement illustrée par Isabelle Malenfant dans les tons de noir et de gris poussière, l’émouvante histoire d’Andrée Poulin lève le voile sur une situation qui sévit à des lunes de nous mais qui est bien réelle. Je craque en versant une larme. »
Nathalie Ferraris - Le Libraire

Quand l’espoir bouleverse
« Un récit bouleversant sur la pauvreté, mais aussi sur l’espoir et la force de survie. Les crayonnés de couleurs sombres appuient avec aplomb ce récit prenant. »
Marie Fradette – La Presse +

Sensibilisation très réussie
« La simplicité du récit et ses multiples rebondissements procurent un plaisir de lecture certain, emmaillé d'une prise de conscience des conditions de vie difficile dans lesquelle se débattent des enfants réels. Une sensibilisation très réussie de la vie en bidonvilles. »
Gisèle Desroches, Revue Lurelu. Automne 2014.
 
Puissance du thème et des images
« Andrée Poulin avance en funambule dans ce récit où elle montre la pauvreté sans tomber dans le misérabilisme et où on sent les mots choisis, pensés, voulus. Un album qui pourrait être lu même au secondaire parce que puissant, tant dans les images que dans l’utilisation du thème. »
Sophie Gagnon - Sophie Lit



Chuchotements éloquents
« Avec finesse et sobriété, Andrée Poulin narre l'indicible; de sa plume tout simple, elle laisse ses mots chuchoter avec éloquence et justesse les jeunes vies de ceux qui, à travers le monde, doivent se taire. Porté par l'univers visuel candide et sensible d'Isabelle Malenfant, cet album fait tomber les ornières et secoue la tranquillité d'esprit de ceux qui mangent à leur faim. Bouleversant.»
Marie Soleil Cool-Cotte - Lili les merveilles


Sans sensationnalisme
« L’illustratrice Isabelle Malenfant rend saleté et misère sans tomber dans le misérabilisme. De son côté, Andrée Poulin évoque une réalité troublante, sans donner dans le sensationnalisme non plus. »
Valérie Lessard – Le Droit
 
Lecture pour arrêter le temps
« Une lecture bouleversante de joie et d’amour, malgré la véritable misère. Un album qui pousse le lecteur à réfléchir à ce qu’il est, à ce qu’il fait. Un livre qui mérite qu’on arrête le temps. Les illustrations sobres et fortes, dans un mélange de différents médiums (pastel, fusain…), accompagnent parfaitement ce récit touchant. Parfait pour une lecture interactive (par l’enseignante), Pablo trouve un trésor permettra d’aborder des thèmes plus difficiles avec vos élèves (la pauvreté, l’inégalité, la famille, la survie), sans toutefois sombrer dans la dépression!»
Mme V. – Le Conditionnel Présent

Beaux et grands rêves
« On est dans la survivance avec tout ce qu’il y a de difficile. On se sent plongé dans l’univers, dans ce qu’il a de plus horripilant. Dessin soutenu, léger, en mouvement, plein de détails. Cet enfant a des rêves grands et beaux comme les enfants d’ici et c’est important de le souligner. »
Sophie Ginoux - CIBL (en baladodiffusion)