vendredi 3 juin 2011

Du plus petit livre du monde au plus grand livre du monde



En voyant ce plus petit livre du monde et ce plus grand livre du monde, je me suis dit que l’extrémisme ne m’attirait pas. J’aime bien le juste milieu, que je peux tenir dans ma main et lire dans mon bain.

Pour voir d’autres livres « atypiques et extraordinaires », c’est ici.

Merci à L'Encre pour le lien.

mardi 31 mai 2011

Où donc vont toutes les histoires mortes-nées?


« Le taux de refus des éditeurs québécois se situe à près de 90%. »
On en parle ici.

Et ici.

90%
Ça en fait des manuscrits refusés!
Des milliers d’arbres trucidés.
Des milliers d’histoires mortes-nées.
Des milliers de rêves flambés.

Étrange paradoxe: ce 90% est à la fois navrant et consolant.
Navrant d’imaginer tous ces créateurs dépités.
Consolant d’imaginer qu’on n’est pas seule à avoir été éclaboussé par les giclures amères du refus.

dimanche 29 mai 2011

Je veux un ami qui partagera son œil avec moi...



Je veux un ami qui partagera son œil avec moi.
Je veux imaginer un personnage aussi mémorable que ce sympathique cyclope.
Je veux pondre une histoire aussi fortement originale qui nous étonne jusqu’à la finale.
Je veux pondre une histoire aussi envoûtante, qui nous enchante jusqu’à la finale.
Je veux que ce Jon Klassen illustre un de mes albums.

Ça fait beaucoup de « je veux ».
Ah pis, tant qu’à y être, un dernier.
Je voudrais vouloir moins.

jeudi 26 mai 2011

Pourquoi dire que le mot pénis est un mauvais mot?


Dans le gymnase d’une école primaire, je présente mon animation d’auteure devant trois classes de 9-11 ans et quatre adultes. Ça fait beaucoup d’yeux braqués sur moi. Une petite fille lève la main. D’un ton un tantinet provocateur, elle déclare :
- Il y a un mauvais mot dans ton livre Les mouffettes de Babette.
- Ah bon? Lequel? que je demande d’un ton innocent. Mon cerveau se met en mode accéléré pour essayer de me souvenir du « mauvais mot » dont elle parle.

Et la petite fille de répondre, d’un ton un tantinet triomphant (genre, tu vas y goûter ma vieille…):
- C’est le mot pénis.

Oh ciel. J’ai effectivement écrit le mon pénis dans Les mouffettes de Babette pour expliquer comment il était difficile de déterminer si un bébé mouffette était mâle ou femelle….

Grand silence dans le gymnase. Tous ces yeux braqués sur moi. Et tout ce beau monde qui guette ma réaction à la façon du lion qui guette la gazelle.

Mon cerveau surchauffe pour trouver une réponse courte, concise, convaincante et convenable. J’avale une grande bolée d’air et je plonge.

Je pose l’index sur mon cou et je dis aux enfants :
- Ça c’est un cou. Est-ce que le mot cou est un mauvais mot?

Je pose l’index sur mon bras et je dis:
- Ça, c’est un bras. Est-ce que le mot bras est un mauvais mot?

Puis j’assène le coup final:
- Le pénis est une partie du corps. Pourquoi dire que c’est un mauvais mot?

Encore tous ces yeux braqués sur moi.
Personne ne répond à ma question.
Je ne saurai pas si j’ai perdu des points ou gagné mon point.

lundi 23 mai 2011

Une piqûre de moustique et tu meurs...

Theodor est attiré par l’empathie. Carolyn aime avoir peur. Yasmine se plait à lancer des fleurs dans les airs. Mike apprécie les gens qui ne se laissent pas embobiner.

Ils sont seulement en troisième année, mais ils ont déjà des opinions bien affirmées. Les élèves de la classe de Mme Deetjens, de l’école Gabrielle-Roy, à Ottawa, ont lu mon roman La disparition du bébé chocolat. Voici un petit échantillon de leurs opinions.


Theodor: « J’ai aimé la partie lorsque Kadi avait tiré un bout de sa robe et l’avait mis sur Léda car elle avait froid. J’ai aimé cette partie car c’était un des rares moments où Léda et Kadi étaient des amies. »


Carolyn: «Moi, la partie que j’ai aimée le plus est quand Dieudonné avait pris le bébé chocolat. Parce que ça m’a fait peur car je ne sais pas exactement si c’était Dieudonné et parce que j’aime avoir peur.»


Yasmine : « J’ai aimé la partie quand Léda a lancé les fleurs rouges dans la piscine. J’aime cette partie parce que ça me rappelle quand j’étais petite, je déchirais les fleurs devant la maison et je les lançais dans les airs. »



Mike: «Moi j’aime la partie quand Dieudonné a dit à Léda de goûter un peu de bissap. Léda a dit oui et Léda a dit qu’elle aimait et Dieudonné a dit : « Je ne te crois pas!»


Yasmine : "Une piqûre de moustique et tu meurs."

samedi 21 mai 2011

« Une goutte d’eau dans la canisse trouée de la misère humaine… »


Certains personnages de roman sont tellement bien campés, tellement complexes et captivants qu’on a envie qu’ils soient des humains en chair et en os. Qu’on a envie d’aller prendre un verre avec eux. Ça ne m’arrive pas souvent mais ça m’est arrivé avec David Dupuis, le héros de Versicolor. Après avoir terminé le roman, j’aurais aimé que cette fiction n’en soit pas pour que David Dupuis devienne mon ami. C’est vous dire la force du talent de l’auteur, Marc Forget.

J’en ai parlé samedi dernier aux Divines Tentations de Radio-Canada.

Médecin de profession, Marc Forget pratique dans le Grand Nord québécois et fait des missions pour Médecins sans frontières. Versicolor est son premier roman. Je croise mes doigts (et mes orteils!) pour qu’il en écrive d’autres.

Dans ce récit qui prend parfois une tangente documentaire (et je ne m’en plains pas), Marc Forget nous entraîne dans l’implacable réalité de l’aide humanitaire. David Dupuis, un jeune médecin qui travaille en Abitibi, décide d’aller travailler au Soudan pour se remettre d’une peine d’amour. Dans le camp de réfugiés, il voit la souffrance humaine à son plus nu, son plus cruel. Le jeune médecin doit se colleter quotidiennement avec le manque de ressources, la corruption et surtout, surtout, la mort.

On voit que Marc Forget connaît bien l’univers qu’il décrit : c’est dur et cru mais ça sonne authentique. Ses chapitres sur les péripéties du médecin au Soudan sont les plus fascinants et les plus denses du livre, rédigés avec sobriété, sans faire dans le sensationnalisme et sans tomber dans la mièvrerie.

Y’a pas que l’aide humanitaire dans ce roman-là. Il a aussi l’amitié et l’amour. Parce que ce cher David Dupuis tombe en amour au Soudan. Et là aussi, c’est intense, d’une sensualité à faire rougir votre grand-mère.

Marc Forget s’éparpille un peu dans son intrigue et l’histoire perd de son intensité lorsque le médecin développe un intérêt pour le cinéma. Mais au risque de me répéter, c’est le héros ici qui accroche et soutient l’attention. Avec ses défauts, sa fragilité, son regard sur les êtres et surtout, sa fabuleuse empathie, ce David nous tire vivement les cordes du cœur.

Comme si tout ça ne suffisait pas, Marc Forget a aussi le sens de la formule. Mon exemplaire de Versicolor est parsemé de petits autocollants de couleur, pour signaler des phrases à noter ou des passages à relire.

Quand David voit des bébés, des enfants mourir, il a ce constat merveilleux: « Dans ces moments, je songe à Dieu. Je n’y crois pas, mais quand je serai sur le point de mourir, je sais que je changerai d’avis. »

Ou encore, pour décrire son engagement au Soudan, le jeune médecin déclare qu’il met sa « goutte d’eau dans la canisse trouée de la misère humaine. »

Parfois, devant le livre d’un auteur inconnu, on tergiverse. Devant un roman qui ne figure pas sur la liste des best-sellers ou qui n’est pas porté par la vague médiatique, on hésite à prendre une chance. Aucune hésitation à avoir devant Versicolor. Même s’il aborde des sujets difficiles, même s’il parle de l’Afrique (qui apparemment n’intéresse pas grand monde…) le livre de Marc Forget mérite un vaste public.

À la fois intense et instructif, engagé et poétique, Versicolor est traversé d’une grande et belle charge émotive. C’est le genre de roman qu’on place sur la tablette des livres à relire.

Versicolor. Marc Forget. Éditions XYZ, 244 pages.

jeudi 19 mai 2011

Il faut de bonnes fesses pour être un bon écrivain...

Designer de la chaise : Deger Cengiz

« Pour écrire un roman(…), il faut surtout de bonnes fesses,car c’est un métier comme celui de couturière, où l’on reste assis longtemps.» Dany Laferrière, dans L’énigme du retour.

Avec l’âge, mon arrière-train s’élargit. Est-ce à dire que je deviendrai une meilleure écrivaine?

Et l’inspiration? Peut-on l'aiguillonner en s’asseyant sur une chaise cactus?