jeudi 12 septembre 2019

Leçon d’écriture 3 – Laisse courir tes doigts sur le clavier



10 leçons d’écriture
ou
La folle histoire de l’enfantement d’un roman


Novembre 2017

Après plusieurs mois de recherche et de bricolage autour de l’intrigue, je dois faire face à la musique. J’ai complété mon outil de travail principal : un tableau avec toutes les scènes, les thèmes abordés, ainsi que les allées et venues des personnages. C’est la charpente de mon roman. J’ai tout ce qu’il me faut pour commencer la rédaction.

J’écris un ou deux chapitres. Je me relis. Ouille! Comme c’est endormant! Banal et beige! Le côté terne de mon manuscrit me frappe comme une claque au visage. C’est d’autant plus décourageant que je sais que les attentes sont élevées pour la suite de Laplus grosse poutine du monde. J’ai peur – très très peur! – de décevoir. Me voilà donc encore plus critique devant chaque paragraphe que je réussis à pondre.


Pourtant, je connais bien la technique du premier jet. Certains auteurs anglophones appellent ça le « vomit draft. » Traduit crûment, ça veut dire le brouillon que tu vomis. À l’étape de la première ébauche, ce n’est pas le moment de corriger la structure, le style, les images, le rythme. Il faut plutôt coucher rapidement sur papier une première version complète de l’histoire. Après, plus tard, ce monceau de mots pourra être relu et retravaillé beaucoup-souvent-longtemps. Comme dit Jean-Philippe Arrou-Vignod, les écrivains ont un grand avantage sur les artistes de scène : ils ont « droit au lendemain. Le droit aux ratures ». 

Tandis que je transpire sang et eau à accoucher de cette première version, j’essaie de garder un certain équilibre : laisser mon imagination s’épivarder, tout en ne m’éloignant pas à des kilomètres de l’intrigue tracée. J’ouvre le robinet des rêveries. Je laisse couler librement les idées. Surtout, surtout, je concentre pour faire taire cette petite voix intérieure, agaçante, celle qui blâme et condamne, celle qui chuchote cruellement : « Ce que tu as écrit est ennuyant, endormant, assommant… » J’essaie d’écrire les yeux fermés pour mieux inviter les images mentales. J’évite d’analyser. Je me retiens à trois mains pour ne pas relire.

Leçon d’écriture 3 : Pour ton premier brouillon, pas de relecture ni de ratures, surtout pas d’autocritique. Laisse galoper ton imagination. Laisse courir tes doigts sur le clavier. 

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